Le sabre japonais.

 

 

La mythologie japonaise.

Comme de nombreux peuples, les Japonais possèdent leur propre mythe de la création : ils sont les descendants des dieux. Les îles japonaises furent créées lorsque les dieux Izanagi et Izanami, debout sur le pont du ciel, agitèrent l'eau de la terre avec une lance. Les gouttes d'eau tombant de la pointe de la lance se rassemblèrent pour devenir les îles du Japon. Le couple créateur descendit alors sur terre et planta la lance dans le sol pour en faire le pilier central de leur maison. Le Japon était né.

Izanagi et Izanami eurent des enfants. La première née fut Amateratsu, la déesse du soleil. Mais comme dans toutes les familles, des drames se produisirent : Izanagi tua son second enfant, le dieu du feu qui avait causé de terribles souffrances à sa mère lors de sa naissance. Izanami, pour cacher sa douleur, se réfugia dans le monde souterrain. Susano-o, l'autre fils, était sujet à des explosions de colère. Son comportement violent le poussait à lancer des éclairs dans le ciel, et il alla même jusqu'à jeter un cheval mort sur Amateratsu, l'obligeant à se terrer dans une caverne. La déesse du soleil ne se montrant plus, le monde fut plongé dans l'obscurité. Une ruse permit de la faire apparaître à nouveau : la vision de sa propre beauté dans un miroir, ainsi qu'un collier de pierres précieuses.

Par la suite, Susano-o se racheta en tuant un énorme serpent à huit têtes. Le serpent était friand de jeunes filles et montrait un goût immodéré pour le saké. Grâce à ces deux points faibles, Susano-o l'attira dans un piège, puis le massacra lorsqu'il fut ivre ! En le dépeçant, il découvrit une épée enchâssée dans sa queue, et il en fit cadeau à Amateratsu. C'était "l'ame no murakomo no tsurugi", ou l'épée qui rassemble les nuages.

Comme elle était l'aînée, Amateratsu hérita de la terre et, quand le temps fut venu, elle envoya son petit-fils régner sur le Japon. Pour lui faciliter la tâche, elle lui fit trois présents, le miroir, les pierres précieuses du collier et l'épée qui rassemble les nuages. Ces trois cadeaux des cieux devinrent les joyaux de la couronne du Japon. Ninigi quitta donc les cieux pour régner sur le Japon, puis le trône échut à son petit-fils Jimmu qui devint le premier empereur humain du Japon. Il monta sur le trône en 660 avant J.C., le 11 février, et cette date est encore commémorée de nos jours au Japon. L'empereur actuel est le descendant direct de ce premier monarque.

Vers l'an 200 avant J.C., l'empereur Sujin et son fils, le prince Yamato (qui régna par la suite sous le nom de Keiko), furent les artisans de profonds changements dans l'histoire du Japon. A cette époque, la nation se composait de nombreux clans et celui de la famille impériale Yamato en était le plus puissant. Les Yamato (nommés d'après leur province natale du centre de l'île d'Honshu) étaient un clan parmi d'autres, mais ils revendiquèrent le droit de régner sur le Japon en raison de leur filiation directe avec la déesse du soleil, Amateratsu. Sujin fut le premier empereur à nommer quatre généraux pour mater les rébellions sur son territoire. Chacun d'entre eux reçut le titre de shogun (que l'on pourrait traduire par "commandant suprême"). Yamato Sujin est un personnage à moitié mythologique, à moitié historique. Il représente le prototype des samouraï ultérieurs : le guerrier noble et habile, harcelé et pourchassé par de nombreux ennemis mais dont la fin tragique fut digne d'éloges.

Mais il faut faire preuve de réalisme – au détriment du romantisme – et les archéologues ont démontré que des communautés humaines vivent au Japon depuis près de 100 000 ans. Les premiers habitants du Japon étaient les Ainu, un peuple sans rapport aucun avec les Mongols. Ces derniers prirent rapidement pied sur les îles japonaises et chassèrent les Ainu jusqu'à ce qu'ils soient tous réunis sur l'île d'Hokkaido. Les envahisseurs se répartirent en tribus et en clans. Progressivement, le clan des Yamato prit le dessus sur les autres groupes grâce à la position centrale qu'il occupait dans la plaine de Kanto. Les chefs du clan Yamato consolidèrent encore leur pouvoir en créant les prémisses du shintô, la religion dominante. Une révolte fomentée contre les descendants d'une déesse est certainement moins facile à envisager que de s'attaquer à un quelconque seigneur de guerre !

 

L'histoire du sabre.

Le sabre de samouraï se définit par son métal: l'acier, son tranchant: simple, sa forme: courbe, sa trempe: différentielle. En étudiant l'histoire du sabre au Japon, 3 grandes époques (+ 1/2) apparaissent:

1) < 900: période Chokuto (1ère période)
Les sabres sont essentiellement l'oeuvre de forgerons chinois et coréens, encore que quelques forgerons japonais commencent à s'y mettre. Leurs lames sont droites et ne font que reprendre la forme des sabres chinois. C'était surtout les officiels de haut rang qui portaient ces armes, qui pouvaient être belles (en particulier celles en provenance de Chine), mais dont la trempe laissait à désirer. Il est souvent difficile de faire la part de la légende et celle de la réalité mais la tradition veut que ce soit un forgeron du nom d'Amakuni qui travaillait vers 700 après J.-C. dans la province de Yamato qui ait conçu le premier sabre à lame courbe et à un seul tranchant. Il semble cependant que la forme définitive n'ait été obtenue que 1100 ou même 1300.

2) de 900 à 1530: période Koto (2ème période)
Les batailles font rage, c'est l'âge d'or des samouraïs et les forgerons se multiplient, en particulier dans ce que l'on a coutume d'appeler les 5 provinces: Bizen, Mino, Soshu, Yamato et Yamashiro (pour reprendre les noms de l'époque). Il semble que ce soit dans la province de Bizen que l'on ait en premier au Japon commencé à forger les lames, et ce pour des raisons matérielles: présence de minerai, charbon de bois facile à obtenir, climat tempéré et qualité de l'eau.

3) de 1530 à 1867: période Shintö (3ème période)
Il semble que la majorité des sabres existant aujourd'hui a été fabriquée dans cette période. Soit près de 1 million et demi de lames.
- 1ère moitié: nombreux forgerons de grand talent (à Kyoto et Osaka).
- 2ème moitié: des sabres plus beaux, élaborés et sophistiqués mais moins efficaces (car peu risquaient de connaître les batailles).

4) 1868 à nos jours (1/2 période)
On ne peut pas vraiment appeler cette époque comme véritable époque car la Restauration (ère Meiji) oblige les forgerons à abandonner purement et simplement la fabrication des sabres. A partir de 1926, c'est la période Showa au cours de laquelle une centaine de forgerons fabrique des sabres de parade pour l'armée et la police. On ne peut donc appeler cette période comme une ultime évolution dans l'art du sabre.

 

Fabrication traditionnelle.

Le sabre et l'âme du samouraï ne faisaient qu'un. Rarement l'un était-il séparé de l'autre et si la pratique orientale veut qu'un objet, un arbre, une statue ou un rocher soit chargé de vie et qu'on lui voue un culte, il va sans dire que cela est encore plus vrai lorsqu'il s'agit d'un sabre, omniprésent dans la mythologie et dans l'histoire du Japon. Tous les éléments constitutifs du sabre (voir ci-contre) étaient confiés à de véritables artistes conscients de collaborer à la réalisation d'un chef-d'oeuvre qui fait partie, avec le Tama et le Miroir, des 3 emblèmes de la dignité impériale.

Différents types de sabres.

 Les métiers.

Le Katana est peut-être l'objet le plus complexe issu de la civilisation japonaise classique, à ce titre, sa fabrication fait appel à de multiples techniques maîtrisées par quatre artisans hautement qualifiés qui se succèdent dans sa fabrication. Par ordre de statut social et qualification technique, ce sont:

1) Le Forgeron
"Prêtre ou magicien", il maîtrise les arts de la forge, de la soudure et de la trempe. Il appartient souvent à une école technique parfois très ancienne et est aidé d'un ou deux assistants qui sont en même temps ses élèves.

2) Le Polisseur
D'un niveau de prestige à peine inférieur au forgeron, il lui revient de façonner la lame et surtout d'en révéler le décor généré par sa structure cristalline. Il travaille en solitaire.

3) Le Forgeron de garde
Rustique à l'époque des premières gardes (tsuba), son métier est devenu "artistique", vers le XVIIe siècle au fur et à mesure de l'évolution des gardes tant par leurs formes que par leur décor.

4) Le Monteur
Constituant le dernier échelon dans la fabrication d'un katana, il peut travailler seul ou sous-traiter certaines pièces, notamment les pièces métalliques. A l'inverse des 3 catégories précédentes, sa dimension mystique se situe largement en retrait de sa dimension commerciale. Il agit sur commande de son client, remonte les lames anciennes au gré des modes, et montant celles de nouvelles fabrications qui lui sont livrées dans un fourreau de stockage en bois brut.

Les matières premières.

Le katana fait appel à une quinzaine de matériaux de base (sans compter tous ceux dont le rôle est intermédiaire) ce sont essentiellement:

1) L'Acier
Dans le Japon médiéval, on utilisait du "fer des marais", la "limonite", réduit dans des bas fourneaux. Par la suite, le pays importa de l'acier de Chine puis d'Europe (via les marchands portugais et hollandais à partir du XVIIe siècle). Un complément était apporté par les rares mines locales.

2) Le Bois
Caché dans le "produit fini", sa beauté naturelle n'a donc pas d'importance: on utilise ainsi du magnolia, un bois blanc particulièrement recherché grâce à ses qualités d'isolant contre l'humidité.

3) La Laque
Produite par extraction de résine végétale, son usage est aussi vieux que le Japon lui-même, elle sert aussi d'isolant hygrométrique.

4) Le Galuchat
Il s'agit d'une peau de raie savamment tannée, son aspect granuleux est des plus esthétiques surtout appliqué sur les poignées, sa texture "agrippe" bien la main.

5) La Soie
La soie est essentiellement utilisée dans le laçage de la poignée, son tressage croisé renforce l'action du galuchat pour éviter que la main ne glisse. Cet aspect est important car l'escrime japonaise fait usage de grands coups circulaires, en conséquence, la force centrifuge tend à expulser le katana des mains de son possesseur. La soie est aussi utilisée - concurremment au coton pour tresser le cordon qui relie le fourreau à la ceinture.

6) Les Métaux Cuivreux
Les japonais font un grand usage de cuivre pur qui se cisèle et se forge facilement même si sa fonte est des plus délicates. Un métal assez répandu est le "Mokume", constitué de plaquettes de cuivre et d'argent soudées entre elles, il est travaillé de manière à faire apparaître les multiples strates à la façon d'un contre-plaqué. On l'utilise parfois pour fabriquer les gardes.

7) L'Or et l'Argent
Ces métaux, assez rares dans le Japon classique, ont été utilisés avec parcimonie sous forme d'incrustations et de damasquinures. 

Composition du katana.

 Le katana traditionnel comporte des éléments parfaitement codifiés depuis le XVIe siècle.

1) La Lame
Elle est munie d'un seul tranchant, et est destinée à frapper de taille. Elle possède à son extrémité une grande soie plate qui s'insère dans la poignée dans laquelle elle est maintenue par une clavette de bambou.

2) Le Fourreau
Constitué de demi coques de bois, il est recouvert de laque, son aspect lisse permet de le glisser aisément dans la ceinture de tissu traditionnellement portée par le samouraï. Autre qualité, la laque permet de facilement faire varier l'angle du fourreau et donc celui de la lame lors du dégainage. Il est renforcé à ses extrémités par une pièce de corne ou de bois dur.

Les secrets de fabrication de la lame.

Le sabre Japonais ne doit ni se casser, ni se tordre et garder son tranchant. Il doit donc être très dur et en même temps suffisamment souple. En métallurgie ces propriétés sont contraires. Les anciens forgerons ont donc imaginé et mis au point un processus très complexe pour aboutir à une lame quasiment parfaite. Tout commence avec la production d'acier brut appelé Tamahagane. Le processus pour obtenir cet acier est unique au monde. Le minerai, déjà soigneusement choisi est fondu avec un mélange de sable ferrugineux et de charbon de bois.

Bungo no kuni Yukihira. classé trésor national. 80cm
 

Ici interviennent les secrets des maîtres forgerons, avec pour chaque atelier des différences dans la manière. Ce qui est commun à tous en revanche, c'est l'énorme travail nécessaire pour obtenir de quoi forger une lame. En effet, seul un infime pourcentage de minerai sera transformé en acier brut. On estime entre 1% et 10% au maximum du poids de départ. Déjà, à ce niveau se dégage l'excellence du matériau. Les morceaux de métal ainsi produits sont cassés en petits bouts de 3 a 5 cm. Le forgeron les triera suivant la teneur en carbone, et donc la dureté qu'il estime en chaque morceau.

Ensuite il réunit le tout en un bloc de la forme d'une brique, puis le chauffe sur un feu de charbon de bois.
A bonne température, le forgeron les aplatit avec un marteau en un bloc compact, puis le trempe dans l'eau et recasse le tout en petits morceaux.
Cette opération peut être répétée plusieurs fois. Ensuite, quand le forgeron estime sa brique de métal prête, il la chauffera et la forgera sur l'enclume en pliant son métal de nombreuses fois.
Ce processus de forge et de pliage successifs, permettra à l'acier de se débarrasser de ces impuretés, tout en uniformisant sa teneur en carbone.

Bien sur, chaque atelier a sa manière de forger et plier le métal. Ce travail sera visible plus tard sur la lame, avec ce que l'on nomme le grain de l'acier. Chaque fois que le métal est plié, cela double les couches d'acier. On arrive donc assez vite à un nombre très important. Il existe une limite au nombre de pliages souhaitables, car après l'acier perd en dureté. Là encore, chaque maître à son secret. Pour répondre aux critères de dureté et de souplesse, le sabre est fait d'acier composite.

Le tranchant et l'extérieur sont faits d'acier très dur, alors que le coeur et le dos sont faits d'acier plus doux. Lorsque le forgeron est en possession des deux qualités d'acier qu'il souhaite, le but est d'enrober l'acier doux de la couche plus dure. Là encore, les méthodes pour réussir cet amalgame peuvent varier suivant les artisans. Une fois la forme de la lame obtenue, on arrive au stade de la cuisson et de la trempe. Ce travail est très délicat. Là aussi, il faut veiller à ce que le tranchant soit plus dur que le reste de la lame.

Pour cela, la lame est recouverte d'un mélange d'argile, de poudre de charbon de bois et de petits secrets de chacun... Ce travail fini, on chauffe la lame sur un feu de charbon de bois, et quand le forgeron estime la bonne température atteinte, il plonge la lame dans l'eau. Le tranchant, moins protégé par une mince couche d'argile, se refroidit plus vite que le reste de la lame, et acquiert sa dureté définitive. Entre les deux parties de la lame, apparaît, bien visible, la ligne de trempe. Sur la partie la plus trempée, le choc thermique transforme l'acier en une structure appelée martensite. Il s'agit de fins cristaux extrêmement durs qui expliquent le redoutable tranchant des Nippon-tô.


Le choc thermique étant diffèrent sur la lame, celle-ci se courbe. Suivant le résultat que le forgeron veut obtenir, il peut retoucher légèrement la courbure. Puis la lame est grossièrement polie, pour lui donner sa forme définitive. A ce stade, si le maître est satisfait du résultat, il donnera la lame au polisseur, qui finira le sabre. On le voit, la forge d'un sabre Japonais n'est pas une mince affaire. Les occasions de rater le sabre ne manquent pas. C'est pourquoi les belles lames ne naissent pas très nombreuses. Même les meilleurs forgerons peuvent rater une lame. Aujourd'hui encore, avec les connaissances actuelles de la métallurgie, les grands maîtres du passé sont rarement égalés.

Le polissage.


Cette phase souvent aussi longue que le processus de forge est conduite avec une extrême minutie. Il s'agit non seulement de donner une forme et un tranchant parfaits à la lame mais aussi de lui donner un poli glaçuré "de céramique" révélant toute les variations cristallines générées par le trempage sélectif de la lame.
Tout au long de son travail, le polisseur fait usage de meules dormantes d'un grain décroissant, en grès au début, en calcaire à la fin. De forme rectangulaire, elles sont posées sur un bloc de bois et calées au moyen d'une pince maintenue par le pied. Devant lui, il dispose d'un bloc d'eau avec l'aide d'une louche de bambou.
Le polissage de la lame est conduit grâce à un mouvement de va-et-vient de la lame sur la pierre. Terriblement répétitif, ce mouvement est aussi extrêmement précis.
Le polisseur joue sur la pression, l'axe de la lame par rapport à la pierre et enfin la dimension des sections travaillées. Ainsi, au fur et à mesure que la lame prend forme la pression devient plus légère, l'axe de travail plus oblique et les sections plus importantes.
 


Afin d'éviter coupures et ampoules, la lame est enrobée partiellement de tissu ligaturé, les mains restent nues pour garder toute leur sensibilité. La pointe elle-même est façonnée à l'aide d'une plaquette abrasive disposée sur une cale de bois portant plusieurs traits de scie transversaux destinés à apporter une certaine souplesse au dispositif.
Enfin le polissage final est conduit au moyen d'une plaquette abrasive extrêmement fine tenue par le pouces la lame étant tenue entre les mains. Le dernier travail du polisseur et non le moindre consiste à révéler la structure cristalline au moyen d'un abrasif légèrement acide.

Dans ce domaine deux écoles s'opposent depuis la nuit des temps, la première préférant laisser à la lame sa beauté naturelle, la ligne de trempe ombrée étant seulement révélée par la pierre acide. La seconde école apprécie "un maquillage" de la lame visant à renforcer les contrastes cristallins.
A cet effet lors du polissage final, le polisseur utilise un abrasif moins fin qui laisse un aspect argenté mat, disposé sous son pouce, il suit soigneusement tous les contours de la ligne de trempe. Le reste de la lame est passé au brunissoir, c'est-à-dire frottée avec une pièce d'acier dur et poli qui va en araser tous les microreliefs et lui donner l'aspect d'un miroir contrastant fortement avec la ligne de trempe.
Lorsque le polissage est terminé, la lame est retournée au forgeron qui, s'il est satisfait de sa qualité, la signe au niveau de la soie au moyen d'un burin.

 

L'entretien du sabre.

Traditionnellement le sabre était le plus important trésor du peuple japonais. Aujourd'hui, il est important de respecter et surtout préserver ces lames superbes, parfois véritables œuvres d'arts. Le sabre doit être traité avec toutes les précautions. Pour ne pas se blesser bien sur, le Nippon- to est tranchant, mais surtout pour préserver ces lames de la rouille, des rayures et des atteintes en tout genre…

Les règles a respecter

-Ne pas oublier que le Nippon- to est avant tout une arme.
-Ne rien faire qui puisse endommager le sabre.
-Ne pas poser les mains nues sur la lame.
-Ne jamais essayer d'affûter son sabre ! Sous aucun prétexte. L'utilisation d'une meule ou même de pierre à couteaux causera la destruction irrémédiable du sabre. Le papier de verre est tout autant interdit. D'une manière générale, tout ce qui est abrasif est à proscrire. Seuls les polisseurs qualifiés peuvent rendre le tranchant d'une lame fatiguée.
-Ne jamais toucher au Nakago. La soie du sabre. La rouille et tout ce qui s'y trouve doit absolument être respecté. Cela est très important pour l'étude du sabre et surtout sa datation. Trop souvent on peut voir des lames dont le Nakago a été " nettoyé " au papier de verre. D'un point de vu commercial, la faute est sévère ! La valeur de la lame sera en chute libre. La soie est un endroit critique du sabre avec le Kissaki, la pointe. Ne pas non plus utiliser d'outils, genre roue de feutre montée sur la perceuse, pour "repolir une lame fatiguée". Le poli d'un sabre japonais n'est pas un miroir. Comment lire les subtilités de l'acier si vous transformez un sabre forgé en acier inoxydable?

Ne pas utiliser de produits chimiques tel que le " mirror " pour nettoyer les parties métalliques du sabre et de ses montures. Le mirror sur les montures, surtout le shakudo, est catastrophique… - Ne pas essayer de vérifier si le sabre coupe.. Les sabres du groupe Nippon- to, s'ils sont utilisés par des personnes maîtrisant les techniques du Tameshi-giri, sont capables de coupes ahurissantes. Mais dans les mains de monsieur " tout le monde " le résultat probable sera sûrement désastreux. Endommager gravement une lame ancienne serait impardonnable. Pour s'entraîner à la coupe, il existe des lames modernes, forgées mécaniquement et donc bien moins cher. L'autre avantage est qu'elles sont sans valeur historique. -Ne pas démonter les montures de la Tsuka. ( poignée ) Le tressage n'est pas simple à refaire et surtout l'interêt est nul. L'histoire des petits papiers à prières des prêtres bouddhistes, insérés entre la tresse et le samé, est une légende. Il existe bel et bien parfois des pliages de papier sous la tresse, mais cela sert uniquement de maintien et de repère au Tsuka-maki , l'artisan qui a tressé la Tsuka.

D'une façon générale, si vous avez la chance de posséder une ancienne lame, le respect s'impose. Même s'il y a peu de chance que cela soit un trésor national, la valeur d'une telle pièce peut être très élevée. Il est donc important de s'occuper convenablement de cette lame. En pratique c'est assez simple. On peut résumer à deux cas de figure. La lame est saine, propre et dans un poli convenable. Dans ce cas, la seule chose à faire sera de prévenir l'oxydation et les rayures qui pourraient gâcher la lame. Il suffit de conserver le sabre dans un endroit sec, de préférence dans sa housse. Un mince film d'huile suffira à empêcher la lame de rouiller. Par contre, l'huile doit être chimiquement le plus neutre possible. Evitez les huiles pour armes à feu qui ne manqueront pas de tacher la lame. Vous pouvez vous procurer de l'huile japonaise, à base de clou de girofle, dans certains dojo ou magasins d'arts martiaux. Vendu avec l'Uchiko, tampon de fine poudre calcaire, cela constitue le matériel de base. Si la lame est fatiguée, malheureusement la seule chose à faire sera un bon nettoyage et surtout d'arrêter la rouille active qui pourrait être présente, quitte à frotter doucement avec une pièce tendre les seuls endroits où le métal serait atteint. Après nettoyage, huiler généreusement en attendant qu'un polisseur qualifié puisse restaurer la lame. Evidement le coût est important, mais la valeur de la lame augmentera d'autant.

Mode d'emploi

Tous les sabres, qu'ils soient en shirasaya ou avec leurs montures complètes ( Koshirae ), doivent être gardés dans leur housse. Pour transporter le sabre, le fourreau doit être pris dans la main droite. La tsuka toujours maintenue plus haute que le fourreau. Ceci pour prévenir les accidents. Quand le sabre est sorti de sa housse, la tsuka ne doit jamais passer sous l'horizontale. Si le sabre possède une certification, celle-ci doit toujours accompagner le sabre. ( Obligation légal au Japon. ) Quand le sabre est manipulé, le tranchant ne doit pas être dirigé vers qui que ce soit. Si une personne désire admirer le sabre, la permission doit être demandée au propriétaire. Celui- ci fournira un chiffon sec et propre, flanelle ou soie, pour que le sabre et les montures puissent être manipulés sans que jamais les mains nues ne soient en contact avec les parties métalliques. La bienséance japonaise veut que celui qui admire le sabre, en plus du respect d'usage, ne donne pas d'avis négatif au propriétaire.
Démontage du sabre

Sabre au fourreau. Avec le mekugi-nuki, ( petit maillet ), sortir le mekugi. (goupille) Tirez le sabre du fourreau avec précaution. Tenir le sabre pratiquement à la verticale dans la main gauche, et frapper le poignet de petit coups secs. Le nakago, (la soie du sabre), va prendre du jeu dans la tsuka. A ce moment prendre la lame avec un chiffon, et la sortir de la tsuka. La prudence s'impose à ce stade. Remettre la goupille dans son logement évitera de la perdre. Si le sabre a sa monture, les seppa, la tsuba, et le habaki seront enlevés de la lame.
Nettoyage

Le nettoyage requière deux pièces de papier japonais, ou à défaut de flanelle. Le premier servira à enlever la vielle huile et les poussières de la lame. Enveloppez la lame du chiffon, puis, en partant de la soie vers le kissaki, (la pointe), essuyer la lame dans un seul geste. (Tenir la lame entre le pouce et l'index, sinon au revoir les doigts…)
Le nettoyage préliminaire requière quelque énergie pour bien enlever toute trace de viélle huile. Il convient d'être prudent en arrivant sur le kissaki, car celui-ci ne doit pas subire de pression ou de friction trop importante. Au cas ou la lame est très sale, il est possible d'imbibé le chiffon d'alcool pur. Une fois la lame parfaitement dégraisser, avec l'uchiko saupoudrer le sabre uniformément, de la base vers la pointe, puis de l'autre coté, de la pointe vers la soie. Puis avec le second chiffon propre, essuyer la lame dans le même mouvement que décrit plus haut. Parfois il peut être nécessaire de répéter l'opération.
Quand la lame est parfaitement propre, s'assurer qu'il n'y a pas de rouille active et autre dommage. A ce moment, le sabre sera remis au fourreau sans être remonté. Le temps de préparer le chiffon propre et l'huile qui protègera la lame pour de longs mois. Il est important que le papier ou le chiffon choisi soit très propre pour ne pas risquer de mettre des poussières avec l'huile neuve. Quand tout est prêt, ressortir la lame, et placé le chiffon sur le mune (dos) du sabre, et procéder dans le même mouvement que précédemment. Le film d'huile doit être fin et Remettre le habaki, les seppa et la tsuba, le tout dans le bon ordre. La soie reprendra sa place dans la tsuka par gravité. Le sabre tenu verticalement dans la main gauche, il suffira de faire descendre la lame en tapant la tsuka sur sa paume droite.
Remettre la goupille. La lame reprendra sa place au fourreau en faisant glisser le mune sur celui-ci. La méthode de démontage et de nettoyage est la même pour toutes les lames forgées, tels que les Naginata ou les Yari. On peut noter que les lames sont très sensibles à l'oxydation après un polissage. On n'hésitera donc pas à les nettoyer plus souvent dans les premiers mois après le polissage.
Plus tard, six mois environ, un nettoyage deux fois par an devrait suffire si l'environnement est sec. De toute façon il devrait être hors de question de conserver un sabre et ses montures dans une pièce humide. Les fourreaux laqués doivent être conservés à l'abri du soleil. En ce qui concerne les montures, la tsuka et son tressage, le fourreau et les laques, il est possible de trouver en France quelques artisans capables de restaurer de belle manière un sabre fatigué. Voilà, avec ces quelques conseils de bon sens, vos pièces devraient traverser les années sans problèmes. Il est de notre devoir de conserver ces témoins du passé dans les meilleures conditions possible pour les transmettre aux futurs amateurs. Tenir dans sa main une lame veille, parfois, de plusieurs siècles ayant appartenue à des générations de héros, même inconnus, et les voir comme si elles sortaient de la forge, étonne souvent le néophyte. C'est tout simplement parce que de nombreux propriétaires successifs ont entretenu jalousement leur bien le plus précieux : Le Sabre.

 

Les disciplines du sabre.

1) Le Kendo ou l'art du sabre.
Il s'agit là de l'art martial principal concernant le katana. Il suppose souplesse et vivacité car le but est de fendre l'adversaire du premier coup.
Cette forme d'escrime - à l'inverse de l'escrime occidentale - ne comprend quasiment que des techniques de tranchants. Elle est très ancienne, trouvant ses origines dès le XIIIe siècle.
Fort heureusement pour l'adversaire, elle se pratique avec 2 types de sabres factices:
- Le Shinai, constitué de 4 lames de bambou qui s'écrasent à l'impact, c'est le sabre d'entraînement.
- Le Bokken, fait d'un seul bloc en bois dur, il sert à acquérir les sensations de frappe et à se "faire les muscles". A l'instar des glaives de bois des légionnaires romains. 

2) L'Iaido ou l'art de Dégainer
La pratique de cet art est complémentaire du Kendo. A l'égal des héros du Far West, celui qui dégaine le plus vite est souvent le survivant d'une rencontre. Ainsi, malgré son aspect philosophique poussé, le Iaido est très réaliste: il indique comment dégainer dans toutes les situations de la vie quotidienne du Japon médiéval, ce peut être la prise de thé avec un ennemi ou bien l'attaque en pleine rue par des spadassins de son pire adversaire,... cet art est aussi philosophique que concret. 

3) Le Tameshi Giri ou l'Art de Couper
Le katana étant une arme de coupe, pour être efficace, il doit faire des entailles suffisamment profondes pour atteindre les organes vitaux (ce qui est plus facile à réaliser dans l'escrime occidentale avec les coups d'estoc). Cet art martial, probablement d'origine chinoise, est le plus spectaculaire de tous, il se pratique sur des bottes de paille ou de roseau humide.

Dans le Japon médiéval, où la vie d'un homme n'avait pas de valeur, on le pratiquait sur des condamnés - vivants ou morts - pas moins de 18 coupes étaient répertoriées, allant de la plus facile (coupe d'un poignet) à la plus difficile (tranchage du corps au niveau des hanches). Non satisfaits de pratiquer leur art macabre sur des corps isolés, les adeptes du Tameshi Giri pratiquaient aussi sur des corps attachés ensembles et posés sur un tas de sable. Des coupes de 3 corps effectués au niveau de la colonne vertébrale n'étaient pas rares. Le meilleur testeur de sabres muni du meilleur katana arriva à couper 7 corps d'un coup.

Pour la petite histoire, certains prisonniers destinés à ces tests avalaient des pierres afin d'ébrécher les lames. D'autres tests plus humanitaires étaient effectués sur des barreaux de chêne, de plomb, de bois de cerf ou de tiges de bambou de 3 à 5 cm de diamètre, une école alla même jusqu'à préconiser la coupe de casques. La propagande japonaise en 1945 surenchérit jusqu'à montrer la coupe d'un canon de mitrailleuse américaine... (malgré la qualité d'un katana, cet exploit est assez difficile à réaliser sans trucage). 

 

Les répliques de sabre japonais.

Vous comprendrez aisément que devant la rareté, le coût élevé et les contraintes juridiques dont la législation japonaise relative aux antiquités n'est pas la moindre, les amateurs de sabres et d'armes blanches longues , pratiquants d'arts martiaux ou simple collectionneurs, se sont tournés vers les reproductions d'origine industrielle de chez Marto, Galdius, Toledo, C.A.S. Ibéria, ...

Quels que soient leurs fabricants, ces répliques appartiennent à 3 catégories principales: 

1) Les modèles Historique
La fidélité est plus ou moins grande avec l'original mais la plupart des productions industrielles ont toutes des lames en acier inoxydable de type 420 S ou 440 A, acier réservé à la coutellerie, et non au sabre et à l'épée.
Néanmoins, la société C.A.S. Iberia propose des sabres de la forge "Hanwei" de Chen Chao Pô (Paul Chen), au Dalian, en Chine, qui forge depuis plus de 700 ans des sabres dans le style Maru-gitae, en acier de carbone 1095, ou mieux encore, avec le fameux acier Suédois en poudre, l'ASSAB-K120C, employant le processus d'argile traditionnel, afin de produire un tranchant dur de 60 RC tout en maintenant le corps de la lame à 40 RC de dureté pour l'élasticité et l'absorption de choc.
La ligne de caractère de la lame, de type O-midari, signifiant "la mer turbulente", est une des particularités les plus belles et des plus importantes de l'épée japonaise. Bien qu’elle soit fortement polie, les 1 000 plis nécessaires pour faire une lame sont visibles.

2) Les Modèles d'Entraînement
A l'entraînement, les pratiquants du kendo font appel à des répliques en bois, mais aussi à des répliques à lame métallique. Ces répliques provenant à l'origine du Japon étaient conformes en tout point aux modèles du passé mais dépourvus de toute décoration. Depuis peu, les firmes européennes proposent des versions affûtés et coupantes avec des lames en acier inoxydable 420 S ou 440 A.
Une fois de plus, la société C.A.S. Iberia propose des sabres de chez "Hanwei", dit "Practical". Il sont en acier 1095, forgés à la main, avec les mêmes techniques de forge artisanales. Ces sabres sont d'ailleurs aussi fiables, depuis leurs améliorations en 1999, que les sabres de Kris Cutlery, artisan forgeron, qui forge les meilleurs sabres au monde.

3) Les Modèles Fantaisie
L'origine de ces produits se trouvent dans les films tel que "Highlander". Les lames de ces répliques sont en acier inoxydable mais non affûtées. La finition de la poignée présente beaucoup plus d'intérêt, mais les matières plastiques sont largement employées. Un tel sabre ne peu avoir de charme, d'histoire, que si on est fan du film en question.

Vidéo.

Arte nous offre un documentaire magnifique sur Le Sabre Du Samurai Japonais.

Voir http://www.dailymotion.com/video/xetk8_le-katana-sabre-de-samourai_creation

 

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