Article paru sur Le Parisien lundi 20 décembre 2004, "veille" de Noël, signé Vincent Mongaillard

"A Saint-Ouen, catholiques et coptes partagent la même église"

Au centre, le père Sourrial, responsable de la communauté; ____
à sa droite, M.Sadek, copte, professeur à l'université de Toulouse;
à sa gauche, un bénévole de la communauté copte de St-Ouen____

"En cette période de fêtes, le Parisien vous propose une série de contes de Noël d'aujourd'hui , de belles aventures humaines et des initiatives généreuses. Pour ce premier rendez-vous, direction l'église du Sacré-Coeur à Saint-Ouen, où fidèles catholiques et chrétiens d'Egypte se sont mis d'accord pour partager le même lieu de culte. C'est en quelque sorte le cadeau de Noël - avant l'heure - de l'Eglise catholique à la Communauté copte.

L'évêque de Saint-Denis, Mgr Olivier de Berranger, vient en effet de proposer aux deux cents chrétiens d'Egypte* résidant à Saint-Ouen de partager son église du Sacré-Coeur, rue Docteur Bauer, Saint-Ouen. Désormais, tous les samedis matin, les fidèles venus de loin se retrouveront pour prier dans l'édifice aux jolies pierres de la cité audonienne. « L'évêque de Saint-Denis et le curé de Saint-Ouen ont été extraordinaires », encense Wadie Saleh, 63 ans, porte-parole de la Communauté copte, par ailleurs patron du Tabac de la mairie. « Ils ont fait preuve d'ouverture », enchaîne son fils Shenouda. « Je suis tellement heureux », applaudit le père Sharoubim, moine à la longue barbe poivre et sel.
____Cérémonie copte à l'église Sacré-Coeur de Saint-Ouen

Ce geste de fraternité a comblé de bonheur les trente familles coptes installées sur la ville. Il faut dire que cela faisait presque une éternité qu'elles étaient en quête d'un véritable lieu de culte local. « J'ai cherché partout. J'ai trouvé un terrain, une ancienne usine ou un pavillon sur la Commune. Mais à chaque fois, le propriétaire refusait de nous céder son bien », regrette Wadie, voix douce et sage moustache blanche. « Et sans église, c'est la perte de l'union », prévient Shenouda. « Pour les coptes, la liturgie est fondamentale. S'ils ne peuvent pas la dire, ils sont comme des nomades, des sans-logis », estime pour sa part Mgr Olivier de Berranger. Pour vivre leur foi, les enfants du Nil n'avaient alors pas d'autre alternative que d'aller prier dans l'église copte de Châtenay-Malabry (Hauts-de-Seine) ou dans leur monastère de l'Yonne. « Malheureusement, tout le monde ne pouvait pas se déplacer », reprend Wadie, en France depuis qu'il a quitté le sud de l'Egypte, il y a vingt-trois ans. Et puis, à force d'implorer le ciel, le miracle est arrivé.
Une convention a été signée entre les deux églises soeurs. Le 13 novembre dernier, les chants coptes retentissaient déjà pour la première fois du côté de la rue du Docteur-Bauer. Quatre heures durant, le père Sharoubim a célébré la messe. Les croyants ont partagé le pain et le vin avec le sourire des grands jours. « C'était un moment de joie, une véritable fête pour nous », s'enthousiasme Shenouda. Les fidèles, qui célébreront Noël le 7 janvier, selon leur calendrier, ont aussi le droit d'utiliser pour le catéchisme une salle située juste à côté de la maison de Dieu. « On a refait l'électricité, le chauffage, la peinture, le parquet. On a fait les mêmes travaux dans le local voisin utilisé par l'Eglise catholique. C'est notre cadeau », lance Wadie.
Comme tous les coptes de Saint-Ouen, le père Sharoubim est ravi de l'accord conclu avec l'Eglise catholique. Tous les samedis, il peut célébrer la messe dans l'église de la ville selon le rite copte. «Dans cette histoire, tout le monde y gagne », sourit Mgr Olivier de Berranger, ardent partisan de l'oecuménisme. Il y a environ deux mois, il cédait la chapelle Notre-Dame-des-Apôtres de Pantin à des Orthodoxes macédoniens."


* Environ 20 000 coptes orthodoxes vivent dans l'Hexagone, principalement au nord de Paris. Ils sont plusieurs millions en Egypte.


Voir aussi: Coptes orthodoxes en France: click ici