Éditions Obsidiane
"Irréparable quant à moi" de Bernard Desportes

Bernard Desportes

Irréparable quant à moi

André du Bouchet

 

Ce livre, agrémenté d'une très belle photographie d'André du Bouchet par François Lagarde et d'une lettre en fac similé, est le témoignage d'une amitié, et, tout autant, une double réflexion sur cette amitié et sur l'œuvre de l'un de  nos plus grands poètes. C'est aussi un travail de mémoire sur la perte. Ce volume est composé de souvenirs, de courts essais et de lettres échangées entre l'auteur et André du Bouchet. Dernières publications de Bernard Desportes : L'Espace du noir, dessins de Marcel Katuchevski (Le livre d'art, 2010) ;  Le Présent illégitime (La Lettre volée, 2011) ; L'Eternité (Al Dante, 2012).



Extraits


André du Bouchet n'aura cessé de reprendre chaque page, chaque poème,chaque texte publié en revue, tout comme les livres donnés un jour pour publication seront aussitôt repris, modifiés, bouleversés, remis à l'œuvre, mis à l'épreuve d'une nouvelle fragmentation en quête de l'insaisissable monde toujours neuf et bouleversé, autre à chaque instant : à jamais inachevé.  C'est cet inachèvement irrémédiable du monde ouvrant à l'insaisisable infini (l'infini devenant l"inachevé) qui induit pour André du Bouchet et l'inachèvement du texte, de la phrase, et la dislocation brusque en éclats.
L'oeuvre impossible (main-d'œuvre toujours) fait du poète, « horrible travailleur », cet artisan à la fois précaire et acharné luttant avec et contre la catastrophe d'une parole emportée, partagée, fragmentée : l'emportement d'un muet saisi au bord de la parole.

(...)

*

D'un impossible pont entre mots et monde, le poème pose ses éclats comme autant de pierres sur l'eau offertes aux pas de l'homme pour franchir le torrent, comme autant d'étoiles perçant le mur d'un ciel aveugle. Ces pierres ne nous parlent ni de leur histoire néolithique ni de leur douleur de pierre : elles témoignent du pied que l'homme pose sur elles dans sa marche. Même chargées d'histoire, ces pierres ne sont pierres à notre pied qu'au présent, dans la présence de notre marche. Les éclats du poème sont des images qui parlent pour l'homme muet dans le saisissement et la suffocation de son affrontement au monde. « L'image est le produit naturel de la briéveté de la vie de l'homme et de l'immensité de la tâche qu'il s'est assignée. C'est cette incompatibilité qui le contraint à tout considérer de l'œil enveloppant de l'aigle, à traduire par brefs éclats son appréhension immédiate. Telle est l'essence de la poésie ».





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