Éditions Obsidiane
"Visite à Aimé Césaire" de Nimrod

Nimrod

Visite à Aimé Césaire


 

Ce nouveau livre de Nimrod comprend deux essais. Visite à Aimé Césaire  raconte donc l’entrevue entre le grand Martiniquais et le poète tchadien, en compagnie de Daniel Maximin. Nimrod narre avec beaucoup de ferveur, mais aussi d’humour, cette rencontre à Fort-de-France, en juin 2006. Le second texte, Aimé Césaire, le poème d’une vie, interroge les ressorts de l’engagement communiste de Césaire dans le contexte négro-africain. Cet « homme en colère », plus immédiatement incisif que Senghor, n’a cependant jamais perdu de vue qu’il était d’abord et avant tout un écrivain français qui s’inscrivait dans la tradition des écrivains  « politiques », tels Hugo, Lamartine, Péguy ou Char.



Extraits


Le tiers-corps du poète

(Amiens, lundi 19 juin 2006)


Partir à la rencontre d’un poète de l’envergure d’Aimé Césaire – qui fêtera son 93e printemps le 26 juin –, lorsqu’on n’a fréquenté que son œuvre, constitue un choc sans retour. Je n’ai jamais songé à l’aborder. La raison en est simple : le grand Martiniquais appartient au royaume mythique. Films, reportages et entretiens ont beau souligner sa proximité, je ne quitte jamais ma place de jouisseur distant. Je m’en suis d’autant plus contenté que c’était – mais je l’ignorais – la posture la plus confortable. À présent que se précise notre entrevue, Aimé Césaire descend de l’Olympe où je l’avais placé pour embrasser les tracas de la vie. M’en voilà bouleversé. En dépit de l’imminence du rendez-vous, je n’ai même pas préparé un mot, un discours. Mon attitude a beau paraître assommante, je me la coltine comme un innocent. Les mythes à l’image des fantasmes gagnent à rester inaccessibles.

    Mais je prie ; j’écarte les idées noires qui m’assaillent. Sans détester l’improvisation, je ne tolère pas non plus la non-préparation. Paradoxalement, j’ai le sentiment de m’être préparé. Je ne comprendrais mon attitude que des années plus tard.

    J’ai accepté avec ferveur d’accompagner Daniel Maximin à Fort-de-France. Dans ma valise, j’ai mis tous les ouvrages du maître. Là-bas, je noterai ses mots et ses gestes. Je ne sais ce que ses livres entretiennent avec mon intention, mais de les savoir du voyage me rassure ...




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